C’est un joyeux luron au regard espiègle qui nous reçoit dans son condo surplombant une place animée d’Hochelaga. « J’aime les gens, c’est pour ça que je reste ici. L’été, j’ouvre les portes, les fenêtres, et j’entends ce qui se passe en bas. Je suis aux premières loges! »

Après de nombreuses années à habiter le calme champêtre de Saint-Hippolyte, Réginald a fait ses valises avec sa conjointe sur un coup de tête, direction la grande ville. « J’ai vraiment fait un choix que les autres ne comprennent pas. Pis moi non plus! » Un mois avant de déménager, il avait dit à ses amis « jamais je ne vais partir d’ici, je vais quitter Saint-Hippolyte les pieds devant. » Un concours de circonstance a fait en sorte qu’il a proposé à son fils de racheter sa maison, et la décision de partir s’est prise rapidement. « Quand je décide quelque chose, taoc! Ôtez-vous de d’là. Je reviens pas en arrière. »
Il habite Montréal depuis tout juste un an et demi, mais le moins qu’on puisse dire, c’est que le retraité d’Hydro-Québec n’a pas mis longtemps à apprivoiser sa ville d’adoption. Aussitôt arrivé, il prend le taureau par les cornes et fonce à la rencontre de son nouvel environnement. Hochelaga-Maisonneuve et ses habitants n’ont déjà plus de secrets pour lui. C’est d’ailleurs en explorant les rues de son nouveau quartier que ses pieds ont fait leur chemin jusqu’à RésOlidaire, un organisme communautaire favorisant l’autonomie et le maintien dans la communauté des personnes âgées du quartier. Il y est bénévole depuis l’automne 2017. « J’ai commencé comme baladeur pour la livraison à domicile de la popote, puis je suis devenu chauffeur. Je rencontre les personnes âgées et je sais qu’elles sont contentes de nous voir. On est souvent les seules personnes qu’elles vont voir dans leur journée, notre présence leur apporte une lumière. »

Enrichir sa vie sociale
S’impliquer bénévolement dans des organisations, c’est d’abord et avant tout pour Réginald une façon de rencontrer des gens. « C’est strictement pour ça. Moi, dire que le bénévolat, c’est pour le bénéfice que les autres en tirent, je m’en sacre, c’est pour moi ! C’est nono hein? Ma blonde me dit « tu leur fais plaisir », ben ils prendront le plaisir qu’ils voudront, ça me fait plaisir à moi ! » Ses activités l’aident à se construire un réseau, à renforcer son sentiment d’appartenance à son milieu. Il tire une immense satisfaction à rencontrer des clients de RésOlidaire dans la rue et à engager la conversation avec eux. Il les écoute, découvre leurs petits secrets, est témoin de leur parcours. « Je rencontre des gens qui me reconnaissent, et ça, ça m’apporte beaucoup humainement. Encore lundi, je rencontrais mon Monsieur Claude. Y est toujours bien habillé, avec des couleurs… Je l’ai reconnu de dos ! C’est un ancien coiffeur, il m’a tout raconté. » Il n’hésite pas non plus à admettre que le besoin de plaire n’est pas étranger à sa motivation. « Je sais pas pourquoi, j’ai toujours été de même. Pas dans la cruise, là, mais dans la séduction. Par exemple, j’ai apporté la semaine dernière chez RésOlidaire des muffins et des madeleines que j’avais faits, des petites attentions pour faire plaisir à l’équipe. J’ai toujours fait ça. »
La feuille de route de Réginald le bénévole est impressionnante. Club de plongée, club de loisir, organisateur politique municipal, président d’une association de résidents, membre du club optimiste de St-Hippolyte… On a affaire à un homme au leadership naturel qui carbure aux projets! Des rallyes, des bazars, des méchouis (« des vrais là, pas à la machine, à la mitaine! »), des sorties à travers le Québec, on peut être sûr que ça bouge quand il se trouve dans les parages. Il n’a d’ailleurs pas attendu d’être dans le CA de RésOlidaire pour y faire bouger les choses. « Je suis ben trop fier de ce que j’ai fait! Avant, on fonctionnait avec un système d’enveloppes dans lesquelles on mettait les sous, c’était archaïque, ça n’avait pas d’allure. J’ai fait des tests avec un stylo qui s’efface, pis une enveloppe plastifiée. Ça marche! Là j’ai une autre idée, je travaille là-dessus. M’as te dire de quoi, il va y en avoir des affaires nouvelles! »

Comme le trahit son regard ratoureux, le petit garçon turbulent qu’il était n’est jamais bien loin. « Je dérangeais à l’école, j’étais tannant. À chaque début d’année, j’étais assis en arrière de la classe, pis je finissais toujours en avant. Pis j’ai pas changé du tout! Je fais toujours des farces, je veux toujours faire rire. » Que ce soit au travail, dans des réunions, ou maintenant avec ses collègues chez RésOlidaire, le bouffon profite de chaque occasion pour faire valoir son sens de la répartie. « On m’a souvent demandé de m’occuper de l’animation dans des événements. J’en ai écrit des bien-cuits! Je suis bon là-dedans. J’ai composé des paroles sur des airs connus. Une année, pour un party d’Hydro, j’avais écrit plusieurs chansons sur les employés. Les patrons, je te les passais au bat! Quand tu le fais en humour, ça passe très bien, mais le message était là en mautadine pareil. »

La famille, d’abord et avant tout
La famille a toujours été au centre de la vie de Réginald. Ses cinq enfants (qu’il a eus avec trois femmes différentes) sont la grande fierté de ce papa poule. Il a eu le bonheur d’élever quatre de ses enfants, l’existence de son aînée ne lui ayant été révélée que récemment, il y a quelques années à peine. C’est tout une surprise qui l’attendait le soir où une amie de sa fille est débarquée chez lui, alors qu’il habitait Saint-Hippolyte. « Êtes-vous le Réginald Paquin qui a travaillé à Mont-Laurier dans les années 80? » Tout de suite, le déclic. « Je n’avais jamais eu de soupçon, je n’ai jamais, jamais su. Quand j’ai rencontré ma fille, elle m’a montré des photos d’elle quand elle était bébé. Je me suis mis à pleurer. J’avais perdu ça. » Il n’a pas perdu de temps à l’intégrer dans sa vie et elle a désormais rejoint son clan. Au mur du salon trône d’ailleurs la fresque familiale, sur laquelle Réginald semble veiller en bon patriarche. Des photos de graduation, des photos de famille, tous ses enfants y sont ainsi que ses deux petits-enfants. On y trouve également une photo du mariage de ses parents, décédés assez tôt dans un accident de voiture. « Ça, c’est ma mère. Elle s’est mariée à 16 ans. À cette époque, ils prenaient la photo, et ils l’amenaient à Montréal pour la faire colorier. Faut le faire! »

Toujours présent pour les siens, dévoué et impliqué, Réginald affirme que RésOlidaire sera son dernier bénévolat. Maintenant membre du CA, la mission de l’organisme lui est chère et il sent un grand respect envers les bénévoles et le travail qu’ils accomplissent. Comme ils viennent tout juste d’emménager dans un nouveau local, parions que les défis sont bien stimulants, et les possibilités infinies pour cet hyperactif avide de projets!

Très beau texte cela décrit bien mon frère qui a toujours su s’impliquer dans des organisations bénévoles. Tous ses frères et sœurs sont très fiers de lui
Un parcours inspirant sur la route de l’entraide
Pierrette Gagné
Dg du CRGM (211)
Un parcours inspirant sur la voie de l’entraide et de la bienfaisance
Toute une retrouvaille… Moi et Réginald étions ensemble pour notre première année de classique et nous ne nous étions jamais revu. Bravo Réginald; on peut dire que tu n’as pas « raté le train ».
Après soixante années, ça va être le « fun » en « câline de bine » de tous se rencontrer à l’ancien Juvénat de La Ferme en Abitibi à l’été 2022.
Si le parcours de chacun des 89 jeunes que nous étions en 1962 est aussi captivant et rempli que celui de Réginald, la fin de semaine de nos retrouvaille va être une grande réussite.